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15 mai 2018 – Conférence « L’Islam en débat : entre radicalisation identitaire et coexistence pacifique » par Gérard DONNADIEU

    Pour sa  conférence du mois de mai la Société des lettres avait invité Gérard Donnadieu, maître en théologie, auteur de différents ouvrages sur l’histoire des religions et enseignant les sciences religieuses au collège des Bernardins et aux facultés jésuites de Paris.

    Lors d’un exposé très documenté le conférencier s’est d’abord attaché à rappeler le contexte géographique et économique de la naissance de l’islam au VIIe siècle en terre arabique déshéritée entre l’empire byzantin chrétien et l’empire perse zoroastre.

    C’est pourtant dans cet espace caravanièr  sans ressources naturelles que les révélations faites au Prophète Mahomet (570-632), entre Médine et La Mecque, ont donné naissance à la troisième grande religion monothéiste après le judaïsme et le christianisme. Mais depuis le VIIe siècle et les cinq premiers califes reconnus par tous les courants, les divisions font rage, engendrant de véritables guerres civiles musulmanes notamment entre Omayyades et Abbasides. Ces différents courants ont tous les deux assuré une expansion exceptionnelle pour l’islam jusqu’au XIIe siècle dans un espace plus grand que celui conquit jadis par Alexandre Le Grand. Et même après, quand la progression occidentale a été stoppée, du côté oriental, au XVe siècle l’empire Mogol (Inde) fût converti.

    C’est de cette brillante branche des Séfevides, que la Perse (Iran) héritera du courant chiite. Mais un telle zone d’influence a généré des problèmes de gouvernance, divisant le monde en de nombreux califats. Entre sunnites, soit 85 % des musulmans d’aujourd’hui, ayant une vision plus orthodoxe de l’islam, tenants d’un retour intransigeant à la loi du Prophète, et chiites (15%) plus modérés et modérateurs, les conflits d’aujourd’hui en Irak, en Syrie, au Yémen, au Pakistan, sont portés par ces deux courants antagonistes. La géopolitique du Moyen Orient est dépendante de cette répartition, avec d’un côté l’Arabie Saoudite et la plupart des autres pays musulmans tandis que l’Iran et l’Azerbaïdjan, très minoritaires, sont exclusivement chiites. Pourtant la majorité des 1,2 millions de musulmans ne sont plus dans les pays arabes mais en Asie, en Indonésie et au Pakistan.

    Le monde musulman est multiforme et interdit de fait tout jugement sans nuance. Après les échecs de modernisation des sociétés après la colonisation, la réponse identitaire portée par le discours fondamentaliste, se référant au temps glorieux de l’islam, reprend du poids, notamment chez les jeunes, faisant naître de nouveaux courants, wahhabisme, Frères musulmans, salafisme, djihadisme (guerre sainte de l’islam). Le mouvement modérateur a du mal à se faire entendre. Après un millénaire de blocage, avec quels interlocuteurs dialoguer devant cette nouvelle assurance musulmane ?

    Une conférence  très riche, en lien directe avec une actualité brûlante.

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